Il n’est pas facile d’entrer dans un univers créatif auquel on est a priori étranger, quand bien même le propriétaire des lieux vous ouvre la porte. Cependant, et c’est heureux, la musique porte loin, alors que d’autres arts restent impassibles sur leurs supports.
L’avantage c’est qu’une invitation par personne interposée permet d’y répondre en dilettante. J’ai donc emboîté le pas de Bernard Bondieu, et pris le parti de m’asseoir à la table d’un autre homme, Pierre Paul Danzin, dont j’ai écouté la voix. A partir de ce moment, je me suis risquée à me promener dans ses textes.
Il m’est difficile aussi de me laisser aller à écouter des résonances que je poserai sur du papier. Il y a la pudeur et la timidité que je m’efforce de planquer aux yeux du monde et la crainte d’y mettre trop de moi. Cet homme, il met de sa chair dans ses mots, il dit « Ecoutez, entendez-moi » là où moi, je me contente de jeter en pâture ce que je fais aux yeux qui traînent, « Voyez ou ne voyez pas, c’est indifférent » dis-je, ou au moins je le prétends.
Me voici, écoutant ses enregistrements audio, lui disant ses textes, racontant ses histoires et jouant avec ses mots. Ne sachant (ni lui, ni moi) jamais si l’un de ses mots peut m’atteindre. Si par hasard l’onde se propage comme un galet bondissant sur la surface de l’eau.
Il n’y avait pas d’obligation, ni d’enjeu, mais j’avais une envie de jouer juste pour le plaisir. J’aurai envie de m’excusez et de dire :
« Voilà Monsieur, je suis entrée pieds nus, j’ai entendu la musique et comme je ne savais rien du chemin, j’ai tenté de garder mes repères, et je ressors plus riche de ce que vous donniez, j’ai pris ça et puis ceci, je me suis chargée en émotions et j’ai laissé traîner, incertaine, quelques empreintes sur le papier… »
Rien de grave, tout s’efface, c’est pour cela que l’on pose les voyages dans des carnets. On respire, envisage, gribouille, on rature impressions sur impressions, des fragments du réel, on croit attraper quelque chose et on en dessine une autre. C’est bu et dilué, punaisé au feutre, cerclé au crayon, dissous à l’aquarelle, collé, juxtaposé et empilé, piégé entre deux feuilles.
J’ai fini mon carnet, je suis revenue de mon voyage. Je ne suis pas sûre d’avoir suivi votre rythme, ni même de mettre tenue aussi bien que vous teniez la note, mais j’ai quand même dansé dessus. Je ne sais pas si je sais danser, mais il paraît que le secret c’est d’être indifférent au regard des autres. Alors j’ai osé.
Merci .